Plus qu’un outil de présence

Plus qu’un outil de présence

Au début d’une saison de soccer, j’avais devant moi, 5 mois, 21 semaines de 2 pratiques qui s’étirent sur une heure trente. Si votre calcul est bon, vous arrivez comme moi, à 63 heures de travail. La saison comptait 17 matchs et comprenait 2 semaines de vacances. Ils avaient, par exemple, 9 ans, ces enfants qui deviendraient mon laboratoire.

Ils ne me connaissaient pas, je ne les connaissais pas non plus. Ils avaients tous été sélectionnés par un processus dans lequel je ne participais pas. J’étais totalement impartial. Nous avions 2 choses en commun, eux et moi. Le sport qu’ils pratiquaient et notre langue, c’est déjà pas mal.

Je ne connaissais pas non plus leurs parcours, même si la première semaine que je les ai rencontrés, j’ai passé du temps à m’intéresser à eux. Ils m’ont raconté leurs histoires, d’où ils viennent et quelle position ils ont joué “toute leur vie”. J’insiste sur “leurs histoires”, car ce qu’ils me racontaient, c’est ce qu’ils avaient vécus, de leur perspective d’enfant, avec leurs bagages à eux. Comme entraîneur, je ne pouvais pas me fier aux dires autant qu’ils l’auraient voulus, car malgré eux, ils étaient biaisés.

Mon meilleur ami, il était en carton, équipé d’une pince, de feuilles blanches et d’un crayon. Je préparais mes 3 premières séances d’avance, 3 thèmes différents et c’était parti. Pendant ces trois séances, je devais prendre beaucoup de notes, j’avais 2 merveilleux assistants avec moi qui s’occupaient de faire bouger les enfants, je leur donnais un seul objectif à la fois, je pouvais donc passer du temps avec certains jeunes et observer, corriger ou encourager.

Ma tâche n’était pas simple, si on décompose une séance en blocs, on en compte au total 7. Le premier, c’est la période où tout le monde arrive, on prend les présences et on gère le chaos en attendant le dernier arrivé. Il y a ensuite le moment où tout le monde est rassemblé en cercle, on se dit bonjour, on se raconte 2 ou 3 anecdotes, c’est bon pour la chimie et on en profite pour transiger vers le contenu du jour. En troisième partie, on se réchauffe, on s’active pour la vraie partie qui compte. Pendant ce temps, moi j’ai déjà commencé à prendre des notes, j’ai l’occasion de voir qui a trop ou pas assez d’énergie, qui est blessé, qui n’a pas mangé. Au-delà de l’individuel, c’est aussi à ce moment que je constate les absences ou les +1, ceux qui pensaient être absents, mais qui sont là. C’est le point de non-retour pour ajuster mes exercices.

Ensuite, il y a 2 blocs d’exercices pratiques où je suis confronté à la perception que j’ai du niveau des mes joueurs et de leur réelle capacité du jour. En terme d’attentes, je dois absolument réagir. Des fois ils sont en avant, des fois il sont en arrière.

L’avant dernier bloc, c’est la partie, le jeu. Pour eux, c’est le summum du jour, enfin, ils peuvent mettre les rigidités de côté et faire ce pour quoi ils sont venus. C’est ce qu’ils pensent. Pour moi, c’est le moment où je peux constater si j’ai atteint mes objectifs ou non comme entraîneur. J’ajoute à mes notes.

Le dernier bloc est bref, c’est la fin. C’est le moment où ils ramassent mon matériel, c’est aussi pendant ce temps-là que je leur demande ce qu’ils ont retenus, ce qu’ils ont aimé et j’en profite pour faire du renforcement positif.

Après mes 3 premières séances, je pouvais maintenant consolider toutes mes données, qu’elles soient mathématiques ou non, pour me monter un programme. Mon programme prend beaucoup de choses en considération, mais ce qui le dirige avant tout, c’est le niveau de mes joueurs. C’est basé sur ma lecture de leur talent et attitude, que je vais monter les 17 semaines qui suivront, avec mes assistants, qui ont autant de valeurs à m’apporter que les joueurs.

J’aurai beau regarder des vidéos de vedettes ou de “naturels”, si dans mon groupe, je n’ai pas de joueur apte à l’appliquer, je ne peux que me divertir avec le contenu. C’est d’ailleur un élément qui complexifie le travail. Mon meilleur et mon “moins” bon.


J’avais plusieurs avantages dans un contexte comme celui-là, pour arriver à mon objectif:

  • Je suis l’auteur du programme et je suis présent avec eux à toutes les pratiques.
    • Je peux prendre mes notes et mes statistiques à chaque rencontre.
    • En cas d’absence, je peux toujours compter sur ceux qui vont donner la séance pour en cumuler aussi.
  • Ils pratiquent un sport où la compétition est une source d’amélioration entre-eux, dont les exercices les confrontent directement à la compétition.
  • Ils pratiquent toujours tous en même temps.
  • À chaque pratique, j’ai une situation de match, un parallèle immédiat entre l’apprentissage et le jeu.
  • Les enfants pratiquent un sport d’abord pour combler un besoin social, ce qui les pousse à revenir.

Le contexte du gym est différent, mais très proche, beaucoup plus que vous pourriez le croire. Même si vous n’avez pas d’objectif compétitif, vous êtes inclus dans la programmation.

Ce qui est différent dans le contexte du gym:

  • Les athlètes ne s’entraînent pas tous en même temps
    • Difficile pour ceux qui programment, de voir tout le monde et par le fait même, de prendre des notes sur votre travail et vos capacités.
    • Difficile d’entretenir un effet de groupe et d’entraînement global pour tous les membres.

Par chance il existe de beaux outils pour essayer d’améliorer toute la prise d’informations. Mais pour y arriver, on a besoin de collaboration. Tout le succès passe d’abord par ce petit principe, mais fondamental.

Pour arriver à faire une programmation à la hauteur de tous les membres de la communauté, il faut nous permettre de faire un suivi et une collecte de données. Et pour ça, on a besoin que les membres entrent leur travail dans le système.

Pourquoi?

S’inscrire à une classe, n’indique pas seulement si le quota sera rempli ou non, il donne aussi une indication à l’entraîneur s’il devra s’ajuster en logistique. Prenons par exemple les rameurs ou les vélos. C’est aussi en fonction du nombre de visites qu’il est possible d’évaluer certaines plages horaires et d’identifier celles qui sont plus ou moins populaires, de manière à adapter l’offre.

Êtes-vous peut-être, sans le savoir, un leader dans l’ombre? Indiquer votre présence sert aussi à motiver d’autres membres à se déplacer, à créer l’effet d’engouement.

Et il y a les chiffres, les poids, les temps. Ces chiffres sont une représentation de votre rendement du jour, le terme “score” porte une connotation trop forte pour ce qu’on cherche à savoir. En réalité, il indique le niveau du succès, du vôtre, mais aussi de la programmation. Sans ces chiffres, la programmation vit dans la spéculation. Certe, pour les compétiteurs nés, ces chiffres sont une référence, mais faites leurs attention. Ils ne sont pas le reflet d’une pleine réalité.

Il n’est pas rare d’entendre que c’était trop facile, trop difficile, pas assez long. Mais sans l’avoir entré dans le système, quelle trace laissez-vous, quelle chance offrez-vous à ceux qui programment, de s’ajuster?

C’est toute la nature d’avoir un outil pour entrer toutes ces données et de permettre de faire profiter toute une communauté, dont vous faites parti.

Pensez-y, un simple effort, un petit geste après l’entraînement, c’est dans votre intérêt.

Pascal Lalonde

Mon histoire est banale, je n’ai rien d’un film hollywoodien et lorsque je m’expose au soleil, ma peau ne brille pas. Je suis un gars ordinaire. Je suis fier membre chez C2 depuis le début de son existence et j'espère pouvoir vous accrocher, autant sinon plus que moi à son image.